InSight/SEIS sonde toujours un peu plus le cœur de Mars

Retour sur ce résultat scientifique, sorti un an après l’atterrissage de la sonde InSight sur Mars, et le début des enregistrements de SEIS le sismomètre français qui mesure l’activité du sol martien.

Vue d’artiste du site d’atterrissage de la sonde InSight sur Elysium Planitia, en journée et durant la nuit. Le jour, l’environnement martien est très agité : les variations de température et les vents aveuglent le sismomètre SEIS. Mais entre 17h00 et minuit, la plupart des phénomènes parasites disparaissent, et SEIS bénéficie alors de conditions exceptionnelles pour écouter l’activité sismique de Mars (© IPGP/Nicolas Sarter).

Dans une série de 6 articles publiés le lundi 24 février 2020 dans Nature Geoscience et Nature Communication, l’équipe scientifique de la mission InSight de la NASA commence à lever le voile sur les mystères de la planète Mars. Les nombreuses données géophysiques collectées lors des 6 premiers mois de la mission éclairent notamment la structure des premiers kilomètres du sous-sol martien et apportent une compréhension nouvelle des phénomènes atmosphérique à la surface de la planète.

Les chercheurs de l’Institut de physique du globe de Paris sont plus particulièrement intéressés à la sismicité de Mars et aux premières analyses sismo-tectoniques martiennes, aux structures internes crustales imagées par ces premières données, et à l’interaction de l’atmosphère martienne avec la subsurface de Mars.

En épluchant les enregistrements du sismomètre SEIS, déployé sur la surface martienne depuis décembre 2018, les sismologues, parmi lesquels des chercheurs de l’IPGP, ont en effet repéré mi-février près de 460 évènements sismiques. 40 sont des signaux basse fréquence, correspondant à des séismes relativement profonds, alors que la grande majorité sont des évènements hautes fréquence, beaucoup plus superficiels et proches, dont l’origine est encore imprécise : petits séismes superficiels, glissement de terrain, micro-ébranlement de falaises sont des sources candidates.

Les ondes sismiques des séismes, sensibles aux matériaux qu’elles traversent, offrent aux planétologues un moyen d’étudier la composition de la structure interne de la planète. En les associant à d’autres sources de vibrations (provenant de l’atterrisseur et de ses instruments ou des tourbillons de poussières qui sillonnent la plaine Elysium), les chercheurs du Mars Structure service, coordonné par l’IPGP et le Jet Propulsion Laboratory, ont pu différencier 3 couches distinctes dans le sous-sol : la duricrust, une couche indurée de quelques centimètres ; le régolite, strate superficielle formée de matériaux concassés par les innombrables impacts depuis des milliards d’années, et enfin une couche d’une dizaine de kilomètres altérés par plusieurs milliards d’années. Sous ces dix kilomètres se trouve une croute profonde consolidée, où la diffusion et l’atténuation observées des ondes sismiques ressemble à ce qui s’observe dans les massifs cristallins terrestres.

Si la croûte martienne commence à livrer ses secrets, les séismes pour l’instant détectés ne permettent pas encore d’illuminer l’intérieur de Mars, et d’« éclairer » le manteau et le noyau. Les premiers résultats fournis par le sismomètre SEIS durant sa première année d’opérations sur Mars sont cependant très encourageant, et la sismologie martienne stimule d’ores et déjà de nouveaux axes de recherche, permettant, in fine, de mieux comprendre la formation de toutes les planètes rocheuses, y compris la Terre et sa Lune.

Références :

Lognonné, P., W. B. Banerdt, W. T. Pike, D. Giardini, U. Christensen, R. F. Garcia, T. Kawamura, et al. « Constraints on the Shallow Elastic and Anelastic Structure of Mars from InSight Seismic Data ». Nature Geoscience 13, no 3 (mars 2020): 213‑20. https://doi.org/10.1038/s41561-020-0536-y

Le LabEx UnivEarthS a contribué à cette recherche par le financement de l’ancien projet Interface “Physique fondamentale et géophysique dans l’espace” (I3)

Ce texte est en partie issu du communiqué de presse publié par l’IPGP lors de la publication des articles. Pour le communiqué entier, rendez-vous ici.